Al Maktoum, 2 Ans Déja: Lettre A Un Vicaire Par Excellence

15 - Mars - 2019

Mon Cher Homonyme,

Il n’y a de conception plus erronée que celle qui te relègue au rang de «guide n’étant plus de ce monde ». Mystiquement, c’est un crime ! Et c’est surtout nier une réalité qui fait la force des vicaires les plus énigmatiques que le ciel ne puisse nous procurer : le fait qu’il n’existe plus de frontière entre la haute galaxie et le monde des humains.

Hier, tu disais que la mort est un centre d’intérêt, à la fois mystique et scientifique. Aujourd’hui, par la force des choses, nous sommes contraints de nous imprégner de ta « posture d’absent le plus présent qui soit.»

Récemment, j’a eu l’opportunité de passer des heures à converser avec deux hommes dont la profondeur des pensées et le rythme des mots qui « pullulent leur verbe évocateur » sont juste authentiques. Parce qu’artiste peintre doublé d’un intellectuel imprégné du « patrimoine Maktoumien », Serigne Ndiaye a su, aux cotés de Souleymane Bachir Diagne, ce philosophe de son temps, échanger sur ton œuvre avec l’ignorant de demi-mesure que je suis. L’auteur de comment philosopher en islam a lui-même reçu des présentations de condoléances de la part de ta progéniture le soir du 15 mars 2017. «C’est parce que ce sont les adeptes de la culture universelle qui sont en deuil », lui a t-on fait savoir au bout du fil.

Au-delà de ça, nous avons surtout échangé sur la notion de « Deuhr » (temps), ainsi que cette prophétie de l’étoile de Médine : « Ne vous immiscez pas contre le temps, car Dieu est le temps. » Si je reviens dans tout ca, c’est que le vocable « temps » occupe une place de choix dans tes écrits, notamment quand il s’agit de peindre les vertus chevaleresques (chiyamoune tou haqiqou djeuwheureul insàne) qui peignent tant l’action de ton homonyme, le grand Aboul Abass Ahmada Tijany (rta). Dans Fa ileyka, tu chantes:

« Faddeuhrou deuhrouka là touqàa rabbou soul tatane

Wal Fathou fathouka Kiffataye Mizaane »

Comme quoi, le “deuhr” ici symbolise toutes les ères, et ceci depuis la venue sur terre de ton homonyme. Cela n’a rien à voir avec le fait pour un vicaire de revendiquer la posture de maitre de son temps (khoutbou zaman), « temps », signifiant « zaman » en arabe, renvoyant ici à une époque précise. Ecoutons celui qui a toujours su s’engager dans les labyrinthes les plus complexes constituant l’architecture même de votre pensée, en l’occurrence Serigne Mouhamadoul Moustapha Sy : « En arabe, le terme Zaman (temps) revêt les mêmes lettres que celui de Miizàne (balance). Comme quoi l’action d’un vicaire s’apparente au poids de ses actions durant le temps d’accomplissement de sa mission. » Voila pourquoi l’intégralité de tes actions demeureront à jamais une boussole qui puisse orienter les esprits, et ceci jusqu’à la fin des temps.

Ta pensée politique aura toujours raison face à « ceux qui se sentent immunisés contre la vérité et le bon sens chaque fois qu’il s’agit de s’accrocher à ce qui leur reste comme lambeaux de pouvoir »-histoire de reprendre tes propos-, ton patrimoine culturel saura éclairer le chemin parsemé d’embuches de ceux qui sont en quête de savoir, ton parcours économique restera un tremplin qui puisse mener à bon port tout entrepreneur voulant cultiver ce champ appelé travail, ton action diplomatique demeurera un remède face aux maux dont souffrent souvent nos ambassadeurs engagés souvent dans des missions « à haut risque », tes discours seront depuis toujours ses leçons de vie qui ne cesseront d’éduquer tant de générations, ta vie religieuse ne cessera de faciliter à tes inconditionnels l’acquisition d’un savoir qui résiste au temps et ses vicissitudes, enfin ta « retraite spirituelle » et ta présence à jamais dans les cœurs réconforteront les âmes trempées des vertus de ta haute science. Face à la crise de personnalité qui sévit dans ce pays, que demander de plus pour être en paix avec soi même ?

Ton vicariat a su faire de tes contemporains des gens qui méritent le titre de « homme », avec ce que cela implique si l’on se réfère à ta pensée : c’est-à-dire un élément de synthèse dont l’humilité reste à la fois le fondement et la signification de sa grandeur. Quoi de plus passionnant que de voyager dans l’univers insondable de ta science ?

Chez nous, le folklore a prit le dessus sur les valeurs d’antan. La fameuse confidence de Sidi Ibrahim Rayàhi, celle là qui suppose que la formule qui fera exploser le monde sera moins militaire qu’on le pense, car se résumant au fait de rendre nécessaire ce qui n’est qu’accessoire, trouve tout son sens au Sénégal. La politique est devenue l’affaire des impénitents, la religion verse dans une tendance folklorique, et la jeunesse se perd dans les dédales d’une crise assez grave. La plupart des jeunes de ma génération ne tendent point l’oreille à des leaders d’opinion. Il n’y a que ceux que les colons désignaient par le terme de « fortes gueules », et que tu avais préféré appeler « ignobles perturbateurs » (al waswààs al khannàas) qui demeurent à jamais des « faiseurs d’actualité. » En attendant, le combat continue, afin que ta philosophie puisse être reléguée au rang de patrimoine dans la forme la plus universelle qui soit.

Maam Cheikh (Senpress)

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