Cybercriminalité : la Dsc découvre 9668 fichiers, vidéos et photos privées dans l’affaire Kocc

Avec l’arrestation de « Kocc Barma », la Dsc a mis fin aux agissements de la plus grande entreprise criminelle numérique connue du Sénégal jusque-là. Nos révélations.

« Mon ordinateur a été sans doute piraté. Vous l’avez exploité sans mon autorisation ». À plusieurs reprises, El Hadji Babacar Dioum, né le 24 février 1987 à Dakar et se disant administrateur de sociétés, a affirmé cette phrase face aux enquêteurs de la Dsc. Devant les preuves techniques formelles réunies contre lui, le mis en cause a tenté tous les moyens de se dédouaner, menaçant des dénégations. Comme quand il a répondu : « Je ne suis pas l’auteur de ce message », lorsque les enquêteurs ont présenté une capture dans laquelle il révélait des identités de présumées victimes sur sa très célèbre page « Kocc Barma ».
Cueilli le 29 juillet peu après l’heure légale de la rupture du jeûne (vers 19 heures), dans une clinique de Liberté 6, l’homme qui se cache derrière « Kocc Barma », a été déféré au parquet. Depuis lors, il est écroué à la prison de Rebeuss.

Selon l’enquête de la Dsc, cette plateforme de délinquance numérique avait diffusé de nombreuses images à caractère pornographique, extraites de la vie privée, extorsion de fonds, menaces, chantage, blanchiment de capitaux mais aussi faux sur des documents publics administratifs.

À la suite d’un autre parquet, El Hadji Babacar Dioum sera édifié sur son sort ce mardi. Les mis en cause le savaient sans doute, les enquêteurs ont débarqué chez lui à l’Unité 7 des Parcelles Assainies, où il habite au 1er étage d’un immeuble. Lors de la perquisition, les éléments de la Dsc ont récupéré son ordinateur portable de marque Macbook Pro 13 pouces, allumé et sous dossier. Face au refus d’El Hadji Babacar Dioum de donner le mot de passe d’accès, le terminal a été exploité techniquement par les limiers.

Dès cet enquête, l’administrateur du compte « Kocc » a été formellement identifié. Les policiers sont alors tombés sur une série de pièces numériques à la fois accablantes et compromettantes : 9668 fichiers ont été retrouvés dans son ordinateur portable.

Rien qu’au niveau du dossier Fédé, par exemple, 1093 photos et 9 vidéos privées et explicites ont été trouvées. Il y avait aussi un dossier R.D. de 401 fichiers à caractère sexuel. Dans un autre rapport d’exploitation du portable d’El Hadji Babacar Dioum, il a été prouvé, la dame S.A.L a dû faire des déclarations de Fcfa pour tenter de discréditer sa vidéo compromise là où A.M.N., un autre nom pour sa discrétion, sur la table 9668 actes de chantage, captations de scènes publiques et privées, menaces et publications de contenus illicites.

C’est le même ordinateur qui contient les codes et autres identifiants, les mêmes ordinateurs et mots de passe, rappellent nos sources, une véritable fortune.

Sur le compte Google d’El Hadji Babacar Dioum, une conversation datée du 28 juillet 2023 est revenue, une conversation menée avec un certain Thierno, alias T.T., un complice présumé. Dans cet échange, les mêmes codes sont réutilisés.

Dans un autre dossier, les mêmes techniques ont été utilisées sur la plateforme pour menacer des personnes identifiées. Certaines d’entre elles ont dû débourser de fortes sommes pour éviter la publication de leurs contenus privés sans consentement. Les autres dossiers sont dénommés « Nouveau dossier 3 » (59 fichiers), « Nouveau dossier 4 » (147 fichiers).

D’autres fichiers enregistrés sous « Preuve », « Film », « WhatsApp Unknown » mettent en évidence une collecte de contenu via une messagerie ou des captures d’écran de conversations.

En plus, El Hadji Babacar Dioum avait aussi mis en place des systèmes de brouillage spécialisés dans la vente de contenus. La société Eddys, spécialisée dans la livraison de signal box, en est un des fournisseurs.

Le plus connu de ces derniers systèmes est dénommé « Smart Way », utilisé pour capter illégalement des signaux de chaînes payantes.

Des conversations extraites de sa messagerie révèlent aussi des transactions liées à la vente d’abonnements TV piratés, notamment Canal+, Netflix, BeIN Sports, etc. Les contenus étaient ensuite revendus en ligne, sur des plateformes dédiées ou directement via des groupes WhatsApp.

Tout cela, en espérant échapper à la traque des autorités, El Hadji Babacar Dioum se présentait comme un administrateur de sociétés, un entrepreneur ambitieux, respecté et à l’aise dans ses relations. Les enquêteurs disent qu’ils n’ont rien retrouvé chez lui qui justifie un patrimoine aussi important, tout semble être lié à des activités de cybercriminalité.

Tout son matériel a été saisi lors de la perquisition à son domicile, à l’exception du brouilleur de signal », a précisé El Hadji Babacar Dioum, dos au mur.

Une autre perquisition a été menée à son domicile personnel situé à l’Unité 7, en face du consulat du Cap-Vert. À cet effet, les limiers ont confisqué ses téléphones portables et ses disques durs.

Les investigations ont manifestement servi : « Il s’agit d’un réseau très structuré basé entre Dakar, Touba et même des ramifications à l’étranger », poursuit un haut gradé de la Dsc, selon lequel El Hadji Babacar Dioum suivait la piste d’une mafia nigériane.

Les enquêteurs poursuivent les recherches pour identifier les complices. Au-delà des arrestations, l’enquête a permis d’en savoir plus sur cette entreprise criminelle, la plus importante du genre au Sénégal, selon les sources de la police nationale.

Liberation