MAIS POURQUOI LA FRANCE N’A-T-ELLE PAS RECONNU SON ACTE DE BRAVOURE ET DE COURAGE ?
Aux grands courageux, la patrie reconnaissante ! Fousseynou Cissé, qui a sauvé une famille de six personnes d'un incendie au 6e étage d'un immeuble, à Paris, vendredi 4 juillet dernier, sera décoré pour acte de courage et dévouement.
Le 24 août 2015, François Hollande, alors président de la République française, a remis la Légion d'honneur à quatre des hommes qui ont permis d'éviter un carnage dans un Thalys Amsterdam-Paris.
"Depuis vendredi, les Français admirent votre courage, le sang-froid dont vous avez fait preuve, la solidarité qui vous a permis, à mains nues - je dis bien à mains nues - de maîtriser un individu surarmé et prêt à tout", a salué le chef de l'État lors d'une réception à l'Élysée, à laquelle assistaient notamment le Premier ministre belge Charles Michel et l'ambassadrice des États-Unis en France, Jane Hartley. "Votre héroïsme doit être un exemple pour beaucoup et une inspiration. Face au mal qui est là et qui s'appelle le terrorisme, il y a un bien qui est celui de l'humanité. C'est celui que vous incarnez".
Cette reconnaissance de la France, Mamadou Dia dit Thiobo ne l’a pas eue, du moins pour l’instant, malgré son monumental acte de bravoure pour sauver des vies humaines.
Nous sommes le 02 novembre 2015, Mamadou Dia et d’illustres personnalités embarquent dans un avion militaire. Elles ne savaient malheureusement pas que ce voyage allait être un des pires moments de leur existence. En effet, à 4800 mètres d’altitude, dans le ciel malien, les moteurs s’arrêtent brusquement, comme par enchantement ! Silence absolu, silence écrasant ! Les pilotes trouvent la bonne idée de lancer les moteurs de secours. Les passagers n’auront pas le temps de pousser un ouf de soulagement que ces moteurs cessent de vrombir. La panique s’installe. Certains passagers tremblaient intensément de peur ! D’autres récitaient des versets du Coran. « Mais moi, j’ai gardé mon sang-froid et j’ai commencé à les assister », se souvient Mamadou Dia. Dans ce contexte de sauve-qui-peut, il tente de détendre l’atmosphère. Mais personne ne prête attention à son jeu. A cet instant, il eut l’idée d’installer chacun à sa place. « Je leur ai demandé de s’agripper à leur siège et de suivre le mouvement de l’avion. J’ai ensuite fermé les hublots », explique notre interlocuteur. En un clin d’œil, l’avion chute, s’écrase, à 70 km de Kayes. De l’appareil volant, il ne restait que des épaves éparpillées çà et là. Le crash était tellement spectaculaire qu’on ne pouvait point penser qu’il y avait eu des survivants. Blessé et couvert de sang, Mamadou Dia perd son instinct de survie et entame une périlleuse opération de sauvetage des autres blessés. C’était une scène d’horreur ! « Les deux pilotes étaient quasiment morts, ils étaient dans le coma. J’ai défoncé la porte du cockpit avec une hache qui était dans l’avion. Un par un, j’ai réussi à les extirper de l’avion », se souvient encore M. Dia. Il réussit aussi à extraire les autres victimes des épaves fumantes de l’avion, à leur prodiguer les premiers secours et, avec un sang-froid imperturbable, à joindre le cabinet du président de la République d’alors pour les besoins de l’organisation des secours. Aussitôt informé de l’accident, Macky Sall saisi son homologue malien Ibrahim Boubacar Keita(IBK) pour lui demander de l’aide. IBK appelle Thiobo Dia pour pouvoir localiser le théâtre de l’accident et envoyer des secours.
En guise de reconnaissance, le président Macky Sall l’élève au grade de Chevalier de l’ordre national du lion pour « acte de bravoure et de courage ». C’était le vendredi 12 novembre 2021, à Paris. La France elle, est restée impassible alors que Mamadou Dia est un « fils » de Marianne. A Dakar, il se rend au consulat de France pour informer les autorités consulaires de l’épreuve qu’il venait de vivre. « On m’a pris pour un fou, finalement c’est une dame qui m’a reçu. Mais manifestement, elle n’a accordé aucun crédit à mon histoire », explique-t-il.
« Aujourd’hui, mon souhait est que mon histoire soit reconnue par mon pays, la France, que j’aime tant » répète le miraculé. « Aux grands hommes, la patrie reconnaissante », peut-on lire sur le fronton du Panthéon, à Paris. Si la grandeur d’un homme peut aussi se mesurer par son courage et sa bravoure, alors Mamadou Dia, au même tire que Fousseynou Cissé et les héros qui avaient permis d’éviter un carnage dans un Thalys Amsterdam-Paris, mérite la reconnaissance de la Patrie !
Cheikh Sidou SYLLA