"EN ARRIVANT, J'ETAIS UN ZOMBIE" : DERRIERE LE PROJET DE LOI IMMIGRATION, L'ATTENTE ET LE STRESS DE DEMANDEURS D'ASILE "AUX PARCOURS SOUVENT TRAUMATIQUES"

17 - Décembre - 2023

Le texte, débattu en commission mixte paritaire lundi, vise notamment à accélérer les procédures de demande d'asile et à faciliter les expulsions des personnes en situation irrégulière. Le projet de loi inquiète plusieurs associations, qui dénoncent des reculs pour le droit d'asile.
"On a peur de la nouvelle loi. De ce que j'entends, ça va être plus difficile pour les immigrés", confie Nafissatou*, une réfugiée mauritanienne hébergée à Lyon, dans un centre d'accueil de demandeurs d'asile (Cada) géré par l'association Forum réfugiés. "Beaucoup de choses nous inquiètent, car ce texte vient durcir le droit d'asile", abonde Laurent Delbos, juriste au sein de Forum réfugiés. Le projet de loi immigration, débattu en commission mixte paritaire lundi 18 décembre, vise notamment à réduire les délais d'examen de demandes d'asile et à faciliter les expulsions.

En arrivant à l'aéroport de Roissy, Marie* est restée 14 jours en zone d'attente pour personnes en instance (Zapi), le temps que les autorités décident si elle pouvait entrer ou non sur le territoire pour déposer une demande d'asile. "Il me manquait des documents, ils voulaient me renvoyer", explique cette mère de famille, qui raconte avoir fui le Congo-Brazzaville pour protéger ses deux filles.

L'Office français de protection des réfugiés et apatrides (Ofpra) rencontre la personne qui fait la demande d'asile, "rend un avis, et c'est le ministère de l'Intérieur qui décide", explique Laure Palun, directrice de l'Association nationale d'assistance aux frontières pour les étrangers (Anafé). "Il s'agit de procédures rapides, qui peuvent être faites par visioconférence, explique-t-elle. Quand la personne fait face à un refus d'entrée, si elle ne veut pas partir tout de suite, elle bénéficie d'un délai d'un jour franc, qui peut lui permettre de faire un recours." Le projet de loi immigration prévoit d'accélérer un peu plus en supprimant ce "jour franc".

"On a passé trois semaines à la rue"
Une fois entrées sur le territoire, de manière régulière ou irrégulière, les personnes sont orientées vers une Structure de premier accueil des demandeurs d'asile (Spada). Nafissatou, venue en France avec son fils pour raison médicale, a été rapidement orientée vers l'une de ces structures. Gérés par des associations, ces centres s'occupent de prendre rendez-vous au guichet unique de la préfecture. "Là, on nous a donné un récépissé, mais ensuite, on a passé trois semaines à la rue, raconte Nafissatou. Et puis on a fini par avoir une place dans un Cada."

Dans un premier temps, la préfecture se charge des contrôles d'identité et des prises d'empreintes puis décide du parcours qui attend le demandeur : procédure dite "Dublin" (pour vérifier si la demande n'est pas du ressort d'un autre pays de l'UE), normale ou accélérée. "Il y a 12 types de procédures accélérées qui entraînent une instruction plus courte, ce sont 40% des demandes d'asile", détaille Gérard Sadik, juriste à la Cimade, association de défense des personnes migrantes. Un quart des demandeurs accèdent à la procédure normale et un tiers d'entre eux sont "dublinés". Ils doivent attendre "entre sept et 23 mois pour déterminer quel pays européen est responsable" de leur demande, explique le juriste de la Cimade.

Les préfectures remettent alors une attestation de demande d'asile et les demandeurs rencontrent dans la foulée l'Office français de l'immigration et de l'intégration (Ofii), qui détermine et fournit les conditions d'accueil : l'éventuel hébergement et l'attribution de l'allocation pour demandeurs d'asile (ADA), au maximum 14,20 euros par jour pour une personne seule. Tous les demandeurs d'asile n'ont pas la chance de bénéficier d'une proposition de logement. "A la fin de l'année 2022, on estime qu'on était seulement à 40% de demandeurs d'asile hébergés, c'est la principale défaillance de notre système d'asile", alerte Laurent Delbos.

"Proximité et simplification"
Mis à part les "dublinés", les demandeurs reçoivent également un dossier à renvoyer à l'Ofpra dans les 21 jours, préalable à un futur entretien. Le projet de loi immigration souhaite supprimer ce délai en créant des "espaces France Asile", afin que l'Ofpra soit présente dès ce premier rendez-vous en préfecture pour recueillir les dossiers. "C'est une bonne évolution, avec deux objectifs : proximité et simplification", explique Julien Boucher, directeur général de l'Ofpra, qui cite cet exemple : "Actuellement, le choix de la langue dans laquelle va se passer l'entretien se fait devant la préfecture. Il semble plus logique que cela soit fait avec l'Ofpra."

"Cette évolution ne doit pas, évidemment, diminuer la capacité du demandeur à se présenter dans de bonnes conditions à l'entretien."Julien Boucher, directeur de l'Ofpra à franceinfo

"Lors de ces 21 jours, les personnes sont accompagnées. Le fait de rabougrir cette phase nous inquiète. Il y a un gain de temps au détriment de la qualité de notre accueil", juge Laurent Delbos. Remplir le dossier de l'Ofpra, qui compte une dizaine de pages, peut se révéler difficile pour des non-francophones. Ceux qui ont la chance d'avoir une place dans une structure d'hébergement bénéficient généralement d'un accompagnement.

Hassan*, jeune Tunisien de 25 ans, a trouvé de l'aide auprès de Florence Kamara, secrétaire générale du Centre LGBTQI+ de Paris et d'Ile-de-France. "J'ai traversé la mer Méditerranée après un passage par l'Italie, je suis arrivé là et j'étais comme un zombie", raconte-t-il, fin novembre lors d'une rencontre avec elle en vue de préparer son entretien devant l'Ofpra. Après plus d'un an d'attente, il vient enfin d'obtenir un rendez-vous pour début janvier 2024.

"La première partie de l'entretien est importante. Ils testent la rapidité, la manière dont la personne répond aux questions."Florence Kamara, secrétaire générale du Centre LGBTQI+ de Paris et d'Ile-de-France à franceinfo

Hassan évoque son histoire d'amour avec un camarade de lycée, son arrestation et les violences homophobes qui lui ont été infligées par la police tunisienne. Florence se met alors dans la peau d'un agent de l'Ofpra et l'interroge. "Raconte-moi la première fois où tu as été attiré par un garçon", lance-t-elle. "A 14 ans, dans les vestiaires au sport", hésite Hassan, qui cherche ses mots. "Il faut que tu sois précis, il faut donner plus de détails, que ton récit prenne vie", conseille Florence. "Ici, c'est facile quand on parle de l'amour. Là-bas, c'est difficile", se justifie le jeune Tunisien. "Oui, on appelle ça de la pudeur, mais souviens-toi que l'agent de l'Ofpra, ce n'est pas son problème", répond Florence.

"Désolé, je suis anxieux"
Le jour J, tous les demandeurs vont devoir prendre le RER afin de se rendre à Fontenay-sous-Bois (Val-de-Marne), puis affronter la longue file à l'entrée du bâtiment de l'Ofpra et les diverses salles d'attente. Ils sont peu à demander l'accompagnement d'une association. Ali*, Bangladais d'une trentaine d'années, est reçu fin novembre dans l'un des 140 boxes dédiés. Un espace sobre de six mètres carrés environ, dont les murs vitrés invitent à la transparence.

"D'abord, est-ce que ça va ?", tente de rassurer Hector, l'un des 450 officiers de protection instructeurs (OPI) de l'Ofpra, conscient du stress engendré par cette démarche. L'agent pose le cadre de l'entretien, explique son rôle, laisse le temps à l'interprète de traduire. "Désolé, je suis anxieux, c'est la première fois que je me trouve dans cette situation", explique Ali, après s'être embrouillé. Les questions, d'abord anodines, s'enchaînent et Hector demande de plus en plus de précisions, relève les contradictions, teste la solidité du récit.

"Là, vous m'avez donné trois dates différentes pour votre arrivée en France..." Hector, agent de l'Ofpra pendant un entretien avec un demandeur d'asile

Ali raconte sa fuite du Bangladesh et explique pourquoi il se sent en danger. Il doit démontrer qu'il répond aux conditions prévues par le droit d'asile et convaincre de la véracité de ses propos. Cet entretien est parfois mal vécu par les demandeurs d'asile. "Je croyais qu'il était là pour écouter les problèmes, mais il m'a embrouillée", témoigne Marie, en attente de la décision de l'Ofpra. Les agents s'appuient sur le récit écrit envoyé avec le dossier, mais certains OPI interrogés par franceinfo relativisent l'importance de ce texte. "On sait bien que certains demandeurs achètent de faux récits, comme l'a montré un reportage de BFMTV", confie l'un deux.

"Voir la crédibilité de son récit remise en cause peut être difficile à vivre, mais d'un autre côté l'Ofpra ne peut pas se contenter d'une parole donnée", justifie Laurent Delbos. "On a la responsabilité d'accorder ou de refuser la protection de la France, donc on doit avoir un positionnement exigeant vis-à-vis des personnes qu'on a en face de nous, confirme Julien Boucher. Ensuite, ce sont des personnes vulnérables avec des parcours souvent traumatiques, donc il faut aussi créer les conditions pour qu'elles puissent s'exprimer".

"Ça a peu de chances de passer"
L'Ofpra a réalisé près de 90 000 entretiens de ce type en 2022. Les syndicats ont d'ailleurs appelé à la grève, fin octobre, pour protester contre une "politique du chiffre" qui affecte, selon eux, la qualité des entretiens. Après un rendez-vous, un OPI rédige une décision, qui sera validée ou non par un chef de section. En cas de réponse positive, le demandeur accède au statut de réfugié ou à la protection subsidiaire et aux droits qui en découlent (RSA, allocations familiales...). En 2022, sur 135 000 demandes, l'Ofpra a répondu favorablement à moins d'un tiers des candidats à l'asile (environ 39 000 personnes), selon les chiffres du ministère de l'Intérieur.

En cas de refus, le demandeur d'asile a toujours la possibilité de contester la décision devant la Cour nationale du droit d'asile (CNDA). Il faut pour cela se faire aider d'un avocat et déposer un recours dans un délai d'un mois. Puis vient l'audience. Rachid*, Afghan de 19 ans, patiente, mardi 28 novembre, à l'entrée du tribunal de Montreuil (Seine-Saint-Denis). Dans une petite salle d'audience, il se présente devant les trois magistrats de la Cour. Le rapporteur lit ses observations, avant de laisser place aux questions des magistrats.

L'Ofpra a estimé que Rachid avait peu de risques d'attirer l'attention des talibans en cas de retour en Afghanistan. "Pourquoi seriez-vous particulièrement ciblé ?", interroge le président. Rachid explique, par l'intermédiaire d'un traducteur, que son père est visé par le pouvoir en place en tant qu'ancien membre des services de renseignement et qu'il est lui aussi en danger en tant qu'aîné de sa fratrie. L'avocat plaide sa cause, insiste sur sa bonne intégration à Mulhouse, mais se montre pessimiste à la sortie. "Ça a peu de chances de passer", souffle-t-il.

Là encore, le projet de loi immigration pourrait changer la donne en confiant à un juge unique le soin de trancher. Toujours dans l'objectif d'accélérer les procédures, la collégialité deviendrait l'exception et serait réservée aux cas jugés difficiles. "Ce sont toujours des situations complexes qu'on ne peut pas laisser à la subjectivité d'une personne, le croisement des regards est important", plaide Laurent Delbos. Rachid, lui, sera fixé sur son sort le 19 décembre. La décision sera consultable sur le site de la CNDA. En cas de rejet de son recours, il ne lui restera que peu d'options. Il pourra faire se pourvoir en cassation devant le Conseil d'Etat, mais "c'est rarississime, il y a quinzaine de décisions chaque année", confie Laurent Delbos. Il pourra aussi tenter une demande de réexamen, s'il arrive à apporter des éléments nouveaux de nature à convaincre l'Ofpra. Sinon, il sera sous le menace d'une décision d'obligation de quitter le territoire français (OQTF) prise par le préfet.

* Les prénoms des demandeurs d'asile ont été modifiés.

Franceinfo

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Auteur : Posté le : 18/12/2023 à 19h45
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