LE SENEGAL A L’HEURE DU DIALOGUE OU DE LA CHIENLIT ? L’EDITO INTERNATIONAL DE MICHEL TAUBE

26 - Avril - 2023

Dans un pays en grande majorité musulman mais bien laïc et le seul à avoir aboli la peine de mort dans le monde islamique (avec la Turquie), et à l’occasion de la fête de l’Aïd vendredi dernier marquant la fin du Ramadan, le président sénégalais Macky Sall a lancé un appel au dialogue avec l’opposition et la société civile.

Le président Sall en est à son dernier mandat, disent certains, tandis que d’autres proches en appellent urbi et orbi à sa participation aux prochaines élections présidentielles de février 2024.

Certes, le Conseil Constitutionnel sénégalais jugera mais le Sénégal qui naguère était la vitrine de la démocratie en Afrique francophone ressemble plus que jamais à un feu de brousse mal éteint qui, au moindre coup de vent, s’embrasera à nouveau.

En attestent les événements survenus depuis deux ans : des manifestations et des affrontements violents avaientéclaté dans le pays après l’arrestation le 3 mars 2021 d’Ousmane Sonko, figure de proue de l’opposition, inculpé de troubles à l’ordre public et d’avoir participé à une manifestation non autorisée alors qu’il se rendait au tribunal pour répondre à une citation à comparaître pour une autre affaire.

Quatorze personnes ont été tuées lors de ces manifestations et émeutes qui avaient duré cinq jours. Douze d’entre elles sont mortes suite à des coups de feu tirés par les forces de défense et de sécurité. Un mois après les événements, les autorités sénégalaises ont annoncé qu’une commission impartiale serait mise en place pour enquêter sur ces faits tragiques. Cependant, deux ans plus tard, aucune information n’a été rendue publique sur les poursuites judiciaires annoncées par les autorités et il n’est pas clair non plus si des enquêtes ont effectivement été ouvertes. Les personnes responsables de ces décès courent toujours.

L’opposition sous la houlette d’Ousmane Sonko reste figée sur ses positions et son refus catégorique de ne pas participer à ce dialogue.

Le 13 avril dernier, des dizaines de partis et organisations de défense des droits de l’homme se sont regroupés pour créer le F24, mouvement des Forces vives du Sénégal, et annoncer une « grande mobilisation » le 5 mai prochain contre la troisième candidature du Président en exercice. Des manifestations sont prévues dans tout le territoire national et de la diaspora », a déclaré son coordonnateur Mamadou Mbodj.

Le président Sall, en bon politique, saura-t-il négocier le dangereux virage de 2024 ?

Les libéraux du PDS avec Karim Wade, fils de l’ancien président, Khalifa Sall, ancien maire de Dakar et héritier légitime du Parti socialiste, Aminata Touré, ancienne première ministre de Sall et récemment déchue de son mandat de députée en représailles à ses ambitions, participeront-ils à ces élections ?

Une chose est claire : le président cherche avec cette invitation au dialogue à protéger ses arrières ou à légitimer sa participation aux prochaines élections présidentielles.

La stabilité du pays a été mise à rude épreuve ces derniers mois : le Mali, contrôlé par des putschistes et le groupe Wagner, la Guinée Conakry en grande instabilité, sont deux pays frontaliers du Sénégal.

S’y ajoute la présence terroriste et la rébellion casamançaise au Sud du pays avec le MFDC (Mouvement des forces démocratiques de la Casamance). Récemment, le 16 mars 2023, jour de mobilisation des partisans de l’opposant Ousmane Sonko, un adolescent a été tué à Bignona, en Casamance, au cours d’affrontements entre les forces de sécurité et les manifestants.

Cocktail explosif pour le Sénégal ? Les acteurs politiques sénégalais auront-ils assez de hauteur pour éviter le pire ? L’Afrique ne se remettrait pas de voir le Sénégal sombrer dans une forme de guerre civile ou d’anarchie politique.

Michel Taube

Fondateur d’Opinion International, éditorialiste politique

Commentaires
0 commentaire
Laisser un commentaire
Recopiez les lettres afficher ci-dessous : Image de Contrôle

Autres actualités

23 - Avril - 2025

Alioune Tine à propos de l’exclusion de Tidjane Thiam de la présidentielle ivoirienne : « La France et l’UA doivent intervenir »

La scène politique ivoirienne est en ébullition après la radiation de Tidjane Thiam, président du Parti démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI), de la...

23 - Avril - 2025

Tidjane Thiam conteste son exclusion de la présidentielle 2025 en Côte d’Ivoire et avertit : « Il n’y aura pas de plan B » :

À quelques mois de la présidentielle d’octobre 2025, la scène politique ivoirienne est secouée par la radiation de Tidjane Thiam des listes électorales. Le...

22 - Avril - 2025

Retrait de l’AES : la CEDEAO en session extraordinaire à Accra

La session extraordinaire de la Cédéao convoquée les 22 et 23 avril coïncide avec le lancement des célébrations du cinquantenaire de l’organisation,...

22 - Avril - 2025

Le Parti du Président Thierno LO se prononce sur l'actualité politique nationale"

Reuni ce Samedi 19 avril 2025 au siège du Parti à liberté 6 extension VDN,le Secrétariat Exécutif National (SEN) de l'APD s'est prononcé sur...

21 - Avril - 2025

Mort du pape François : Bassirou Diomaye Faye rend hommage à ‘’une figure spirituelle majeure’’

Le président sénégalais, Bassirou Diomaye Faye, a déploré la mort d’‘’une figure spirituelle majeure’’, après le...