SENEGAL: OUSMANE SONKO, UNE SAGA POLITICO-JUDICIAIRE EN HUIT DATES

02 - Août - 2023

8 février 2021 : Convocation pour viols présumés

Le 8 février au matin, l'opposant sénégalais est convoqué à la gendarmerie pour une affaire de viols. Six jours plus tôt, une jeune employée d'un salon de massage de Dakar a déposé plainte contre lui pour des viols répétés avec menaces.

Dans une déclaration à la presse, Ousmane Sonko rejette cette accusation. Le député du Pastef (Patriotes africains du Sénégal pour le travail, l'éthique et la fraternité), arrivé troisième à la présidentielle de 2019 et présenté comme le leader de l'opposition, dénonce une machination où il voit la main du chef de l'État Macky Sall. Bénéficiant d'une immunité parlementaire, il annonce qu'il ne répondra « à aucune convocation de la gendarmerie si la voie légale n'est pas respectée ».

Son immunité est finalement levée par l'Assemblée nationale le 26 février après deux heures de débats houleux. Quatre-vingt-dix-huit députés ont voté pour, un contre et deux se sont abstenus.

3 mars 2021 : Arrestation et trois jours d'émeutes

Alors qu'il se rend au tribunal accompagné d'une foule de partisans pour répondre à la convocation du juge d'instruction, Ousmane Sonko est arrêté et placé en garde à vue pour « troubles à l'ordre public ». La cause : des tensions engendrées par un différend avec la préfecture sur l'itinéraire du convoi. Cette interpellation déclenche trois jours d'émeutes dans plusieurs villes du pays, qui feront au moins cinq morts.

Le 5 mars, c'est donc dans un climat tendu que l'opposant est finalement présenté au doyen des juges d'instruction qui l'inculpe pour viols et menaces de mort. Libéré sous caution trois jours plus et placé sous contrôle judiciaire, le leader du Pastef appelle ses partisans à une mobilisation « beaucoup plus importante », mais « pacifique ». « La révolution est déjà lancée. Rien ni personne ne pourra l'arrêter », lance-t-il devant la presse.

23 janvier 2022 : Victoire à Ziguinchor

Ce dimanche 23 janvier au soir, Ousmane Sonko n'attend pas la proclamation des résultats officiels pour célébrer sa victoire aux élections municipales et départementales qui s'achèvent. L'opposant vient de remporter la mairie de Ziguinchor, la plus grande ville de Casamance, une étape importante vers la présidentielle de 2024 pour laquelle il ne cache pas ses ambitions.

Car cette victoire n'est pas seulement locale, observe la correspondante de RFI à Dakar, Théa Ollivier. Durant la campagne, Ousmane Sonko s'est déplacé dans tout le pays pour soutenir les candidats de la coalition d'opposition Yewwi Askan Wi. Une bonne manière de placer ses pions en vue des législatives à venir et de la présidentielle.

18 août 2022 : Candidature à la présidentielle

Seul face à la presse, une affiche « Horizon 2024 » aux couleurs du Pastef en arrière-plan, l'opposant Ousmane Sonko annonce sa candidature à l'élection présidentielle de février 2024. Ses priorités d'ici-là : encourager les jeunes primo-votants à s'inscrire sur les listes électorales et densifier l'implantation territoriale de son parti.

L'opposant est dans une bonne dynamique. L'inter-coalition dont il est l'un des leaders vient de remporter 80 sièges lors des législatives du 31 juillet, juste derrière la coalition présidentielle qui, avec 82 sièges, perd sa majorité absolue à l'Assemblée nationale.

8 mai 2023 : Condamnation en appel pour diffamation et injure publique

Déjà sous le coup d'une inculpation pour viols, Ousmane Sonko est condamné ce lundi 8 mai en appel à une peine de six mois de prison avec sursis pour diffamation et injure publique envers Mame Mbaye Niang. Le maire de Zinguinchor, absent à l'audience, avait publiquement accusé le ministre du Tourisme d'avoir été épinglé dans un rapport de l'Inspection générale d'État pour des détournements. Outre cette peine de prison avec sursis, la cour d'appel confirme le montant de 200 millions de francs CFA de dommages et intérêts fixé en première instance.

Alors que cette condamnation menace son éligibilité pour la présidentielle, Ousmane Sonko appelle ses partisans à la mobilisation et à la résistance. « Seul Dieu peut empêcher ma candidature (...) Aucun être humain ne peut l'empêcher », lance-t-il le lendemain dans une allocution vidéo. L'opposant crie là encore à un complot ourdi par Macky Sall pour l'écarter de la course à la présidentielle, tandis que ses adversaires l'accusent d'instrumentaliser la rue pour échapper à la justice.

26 mai 2023 : La « caravane de la liberté » en route vers Dakar

Depuis Zinguichor, Ousmane Sonko entreprend son voyage de retour à Dakar à la tête d'un long convoi populaire. Ce « convoi de la liberté » apparaît comme un nouvel acte de défiance à l'encontre du pouvoir, après le refus de l'opposant de comparaître à son procès pour viols.

Après avoir passé la nuit à Kolda, le convoi doit s'arrêter pendant plusieurs heures en raison d'échauffourées opposant les sympathisants d'Ousmane Sonko aux forces de l'ordre. Selon un communiqué du procureur de Kolda, ces affrontements ont fait un mort. La « caravane » est finalement stoppée le 28 par les forces de l'ordre qui ramènent de force l'opposant à Dakar.

1er juin 2023 : Condamnation pour « corruption de la jeunesse »

Ousmane Sonko est condamné à deux ans de prison ferme pour « corruption de la jeunesse » dans l'affaire qui l'oppose à Adji Sarr, qui l'accusait de viols répétés. Le 23 mai, à l'issue d'une journée d'audience marathon qui s'était tenue en l'absence de l'accusé, le parquet avait requis dix ans de réclusion criminelle pour viols ou cinq ans de prison pour le délit de « corruption de la jeunesse ».

Des violences éclatent dans plusieurs quartiers de Dakar, faisant des dizaines de morts.

31 juillet 2023 : Inculpation et dissolution du Pastef

Ousmane Sonko est inculpé d'« appels à l'insurrection et complot » contre l'État et placé en détention. L'opposant avait été arrêté trois jours plus tôt à son domicile après avoir « arraché » son téléphone à une gendarme qui, selon lui, le filmait sans son accord. Cette nouvelle inculpation compromet davantage sa participation à la présidentielle de février 2024, pour laquelle Macky Sall a renoncé au début du mois à se présenter.

Le gouvernement sénégalais annonce dans la foulée la dissolution de son parti. Le ministre de l'Intérieur justifie cette décision par les appels « fréquents » du Pastef à des « mouvements insurrectionnels » qui ont fait de nombreux morts en mars 2021 et juin 2023. Des émeutes éclatent, faisant deux morts à Zinguichor et un autre à Pikine.

rfi

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