Sénégal : difficile à obtenir, le label bio freine l’essor de la filière

28 - Février - 2017

Le Salon international de l’agriculture se tient cette semaine à Paris. Comme tous les ans, plusieurs pays africains y sont représentés. C’est le cas notamment du Sénégal, dont plusieurs stands mettent en avant l’agriculture biologique. Bien que le nombre de professionnels qui se tournent vers ce secteur augmente chaque année, le démarrage est encore lent. Obtenir les certifications est un véritable chemin de croix pour les producteurs sénégalais.

L’entreprise Diongoma est installée à Salemata, dans le Sud-Est du Sénégal. Elle fabrique du beurre de karité, de l’huile de baobab ou encore d’hibiscus… 100% bio. Ces produits sont certifiés par l’organisme français Ecocert. Un label difficile à obtenir pour Mariama Sylla, directrice de Diongoma : « Ce sont beaucoup de documents, surtout beaucoup de papiers. Ça coûte plus cher de faire du bio parce qu’on doit faire attention à beaucoup de choses. On a des surcoûts liés à l’organisation, aux formations que l’on donne aux groupements de femmes, au personnel avec lequel on travaille. Même si ça coûte cher, je pense que c’est rentable. Les affaires vont bien mais c’est quand même compliqué quand on est une petite entreprise, que l’on n’a pas d’aide de l’Etat, ni de personne, que l’on doit tout faire tout seul. Tout ce que l’on gagne on doit le réinvestir et c’est très difficile. »

Sylvie Sagbo Gommard est la directrice adjointe de Senar les délices Lysa qui transforme arachides et cajous depuis 1982 selon des méthodes naturelles. Malgré cela, ces produits ne peuvent se dire bio, car il leur manque la certification. Pour l’obtenir, l’entreprise doit encore investir.

« Pour avoir la certification nous nous sommes regroupés avec deux autres entreprises afin de mutualiser les coûts, se désole Sylvie Sagbo Gommard. On n’est pas loin de 3 500 euros, rien que pour la certification. Mais derrière il faut suivre, c’est-à-dire aller voir les producteurs certifiés, acheter leur produit à un prix plus élevé que le coût normal. Si je certifie mes produits bio, je dois aussi les transformer en dehors de mon unité de production actuelle. Je suis donc en train de délocaliser et de construire une usine plus grande dont une partie sera dédiée au bio. C’est un très gros investissement : environ 200 millions de francs CFA. Ça coûte très cher, ça fait enrager parce qu’en plus on sait que nos produits son bio. »

Pas une priorité

Bien que la filière soit porteuse, le bio n’est pas une priorité du gouvernement sénégalais. Le Plan Sénégal émergent insiste sur la nécessité d’atteindre l’autosuffisance alimentaire et donc de produire plus.

« Ceux qui arrivent à trouver, même un petit créneau d’exportation en produits bio, voient leurs revenus augmenter, même si la production n’augmente pas, explique Amadou Moustapha Mbaye de l’Agence nationale du conseil agricole et rural. Ce sont vraiment des prix extrêmement différents de ceux des produits traités avec des produits chimiques. Pour nous c’est une niche d’amélioration des revenus. Mais le bio à 100%, surtout dans des zones sèches, peut entraîner des problèmes de productivité. Pour certains produits, très spécialisés et exportables, on peut trouver un créneau pour le bio. Mais pour la production de masse, pour atteindre l’autosuffisance, il faut quand même, une fertilisation raisonnée. »

Avec près de 26 000 hectares certifiés, le Sénégal est au neuvième rang des pays africains qui pratiquent l’agriculture biologique.

RFI

Commentaires
0 commentaire
Laisser un commentaire
Recopiez les lettres afficher ci-dessous : Image de Contrôle

Autres actualités

02 - Mai - 2020

FACE A L’IMPERIALISME DE LA DETTE : NE SOYONS NI SENEGALAIS NI BENINOIS MAIS ANTI-IMPERIALISTES PANAFRICAINS (Par Guy Marius Sagna)

Depuis quelque temps, le président Macky Sall et d’autres comme lui qui n’ont jamais osé dire du mal du franc CFA, des APE, des bases militaires...

30 - Avril - 2020

France: Le produit intérieur brut (PIB) a chuté de 5,8% au premier trimestre, selon l'Insee

Le produit intérieur brut (PIB) français s'est contracté de 5,8% au premier trimestre du fait, notamment, du confinement en place depuis la mi-mars pour endiguer la...

30 - Avril - 2020

Marchés Aide alimentaire sucre, huile, pâtes: Macky Sall zappe la production locale au profit des businessmen

Le président de la République a raté une très belle occasion de doper l’industrie locale. En effet, s’il avait injecté une bonne part des 66...

30 - Avril - 2020

La pandémie du COVID-19 : une légitimation de la promotion de l’agriculture urbaine (par Dr Sidy TOUNKARA)

La crise sanitaire provoquée par le COVID-19 a été suivie par des mesures fortes telles que la restriction de la mobilité des personnes et la limitation de...