Sénégal – Justice sélective, mémoire mutilée : les oubliés de la crise en Casamance (Par SOS Casamance)
Au Sénégal, la demande de justice pour les victimes des violences politiques récentes, survenues durant le régime de Macky Sall, occupe aujourd’hui une place centrale dans le débat public. Les appels à la vérité et à la réparation se multiplient — et à juste titre.
Mais une question dérangeante s’impose : pourquoi le même élan de justice ne s’étend-il pas aux victimes civiles et militaires de la longue crise en Casamance ?
Des victimes oubliées
Depuis plus de quarante ans, la Casamance, région du sud du pays, endure les conséquences d’un conflit qui a profondément marqué le tissu social, économique et humain. Des milliers de morts, des villages détruits, des familles déplacées, des mutilés et des orphelins — et pourtant, un silence quasi total des institutions nationales.
Ces victimes, souvent anonymes, n’ont jamais bénéficié ni de reconnaissance officielle, ni de réparation symbolique ou matérielle.
Pendant que les discours politiques se concentrent sur les affrontements récents entre le pouvoir et l’opposition, les blessures du Sud restent béantes, ignorées par une mémoire nationale sélective.
Un silence politique révélateur
Ce silence n’est pas anodin. Il traduit une forme d’injustice structurelle et une hiérarchie de la souffrance au sein de la République.
Les différents régimes — d’Abdoulaye Wade à Macky Sall, jusqu’à l’actuel duo Sonko–Diomaye — ont tous puisé, à un moment ou à un autre, dans les frustrations et les inégalités issues de la crise casamançaise pour nourrir leur discours de changement ou d’alternance.
Mais une fois arrivés au pouvoir, la Casamance redevient un sujet marginal, une plaie que l’on préfère recouvrir de silence plutôt que de soigner.
Pour une justice égale et une mémoire partagée
La véritable réconciliation nationale passe par la reconnaissance de toutes les victimes, sans distinction d’origine, de contexte ou de période.
La paix ne peut se construire sur l’oubli ou la condescendance politique.
Il est temps que l’État sénégalais, les partis politiques et la société civile affrontent ce déni collectif et reconnaissent le prix humain de la crise en Casamance.
La mémoire mutilée d’un peuple ne guérit que lorsque la vérité et la dignité sont restaurées.
La dignité n’a pas de frontière.