DANSOKHO, LE DERNIER MOSSI ! (PAR ABDOULAYE THIAM )

24 - Août - 2019

Le Sénégal est une démocratie. C’est une réalité. Nous sommes un peuple libre. Libre dans ses pensées et ses actes. Mais pour en arriver là, nous le devons à des hommes et à des femmes qui se sont battus pendant des années, voire des siècles afin que l’actuelle génération ait le droit au chapitre. Parmi ses hommes et ses femmes, nous devons retenir Amath Dansokho qui nous a quitté hier, vendredi 23 août, à l’âge de 82 ans. Journaliste, leader politique et syndical, homme d’Etat, le «Lion» de Kédougou est mort avec ses convictions.

Courageux et patriote, il a marqué son temps d’une empreinte indélébile. Tel l’empire Mossi qui l’a façonné et guidé ses pas, Amath Dansokho ne s’est jamais avoué vaincu. De Léopold Sédar Senghor à Abdoulaye Wade en passant par Abdou Diouf, l’ancien secrétaire général du PIT a été de tous les combats contre l’injustice, la mal-gouvernance, la pensée unique. Son franc-parler en bandoulière, Dansokho a fait de la liberté son sacerdoce. Ce qui lui avait valu d’être renvoyé dans les gouvernements de Diouf et de Wade pour avoir osé critiquer leur gestion du pays.

Alors qu’il avoue avoir été admiratif de Senghor, Amath Dansokho confie par la même occasion avoir tenté une insurrection à Saint-Louis en… 1961 contre le premier président du Sénégal. Ses confidences faites sur les ondes de Sud FM, dans l’émission, Xel Xeli, animée alors par Abdou Latif Coulibaly, témoignent de son courage et sa détermination dans la lutte contre l’asservissement du peuple sénégalais.

Communiste convaincu, il n’a pourtant pas hésité à dénoncer l’invasion soviétique et à envoyer une lettre de solidarité aux dirigeants de pays socialistes «à visage humain». «Je suis pour le respect des droits de l’homme. Je n’ai jamais participé à une action liberticide», avait-il confié à nos confrères de l’Observateur Paalga du Burkina Faso en janvier 2007. Grand artisan de la première alternance démocratique survenue au Sénégal, le 19 mars 2000, Amath Dansokho sera également le premier allié de Me Abdoulaye Wade à dénoncer les dérives de ce dernier.

D’ailleurs, l’histoire retiendra que son parti, le PIT et le Jël-Jël de Talla Sylla, étaient les seules formations politiques à avoir demandé à voter contre la Constitution de 2001, qui, selon lui, conférait trop de pouvoirs au président de la République. Ce qui était contraire au programme de la CA-2000 que «lui-même, Wade, a contresigné, puisque c’est lui qui en a fait la préface», confiait-il à l’époque. On connaît la suite.

Son dernier combat politique a été de lutter contre la dévolution monarchique du pouvoir, tentée par son ancien compagnon, Me Wade. Il participa alors à porter Macky Sall à la tête de la magistrature suprême, le 25 mars 2012, après avoir soutenu Moustapha Niasse au premier tour, comme ce fut le cas en 2007 avec le Secrétaire général de l’AFP. Faiseur de roi, le charisme d’Amath Dansokho dépasse les frontières.

Respecté par tous, il laisse derrière lui, une jeunesse en perte de repères et de leaders. Seule la «faucheuse» pouvait vaincre le dernier des Mossi. Adieu, El Commandante !

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