Au Sénégal, quand la diaspora revient

25 - Avril - 2018

On les appelle les "repats", par opposition aux "expats". Les "repatriés", ce sont les immigrés qui ont choisi de revenir dans leur pays d'origine. Au Sénégal, ils sont de plus en plus nombreux à faire ce choix, séduits par la stabilité politique et la forte croissance.

Soad Diouf a tous les attributs de la femme d’affaires. Hyperconnectée, en tailleur sombre et talons vertigineux, la poignée de main volontaire. Elle nous reçoit au siège de son entreprise dans le centre de Dakar.Il y a un an et demi, Soad Diouf, 32 ans, a quitté Rouen, où elle a fait toutes ses études (en génie des systèmes industriels) et elle est revenue s’installer à Dakar. Elle y a ouvert un cabinet d'audit énergétique, grâce notamment à une subvention de 7 000 euros, versée par l'Ofii (Office français de l'immigration et de l'intégration), l'organisme qui finance les retours volontaires.Pour Soad Diouf, le retour au pays était un "devoir moral".

Il vaut mieux rentrer et développer notre pays en étant sur place, plutôt que d'envoyer de l'aide. (...) Un pays ne s'est jamais développé avec de l'aide.

Au départ sa famille n'était pas franchement ravie. "Pour eux, il faut rester en Europe. C'est l'Eldorado, explique-t-elle. Mais c'est un mythe. Ils adorent l'Europe mais il ne la connaissent pas. Ils ne voient que les touristes qui viennent ici, mais quand on est en vacances, forcément, tout est parfait _!"Aujourd'hui, Soad Diouf ne regrette pas la France, même si elle est un peu "nostalgique"_ de la Normandie.

Des opportunités à saisir
La réticence des familles est bien souvent un frein au retour mais il faut passer outre, estime N'daga Sarr. En France, il était cadre chez Adecco. Il est revenu à Dakar il y a deux ans. Aujourd'hui il travaille dans un cabinet de recrutement."Certains de mes proches pensaient que j'avais un problème de visa, que je ne pouvais pas rester en France. Pour eux, il était impensable que l'on quitte la France, ce beau pays où il y a de l'argent et des gros salaires ! Mais aujourd'hui je fais la fierté de beaucoup de gens et j'en suis fier."Au Sénégal, les opportunités de travail pour ces "repatriés" sont nombreuses. La croissance du PIB atteint 7 % et, grâce au plan Sénégal émergent, lancé par le président Macky Sall, le pays est un vaste chantier. Des villes nouvelles sortent de terre, sur le modèle de ce qui s’est fait en France.Abdoulaye Ba est le directeur d’un cabinet de conseil. Lui aussi est un ancien immigré. Multidiplômé, il est rentré de France dès 2008.

L'Eldorado c'est l'Afrique. Parce qu'en Afrique, tout est à faire, tout est à construire. Toutes les matières premières viennent d'Afrique. Les Africains sont de plus en plus formés et qualifiés.

Abdoulaye Ba appelle de ses voeux un "sursaut patriotique" pour que la jeunesse africaine reste chez elle. "Chacun peut apporter sa contribution." Il cite John Fitzgerald Kennedy : "Ne vous demandez pas ce que votre pays peut faire pour vous, demandez-vous ce que vous pouvez faire pour votre pays."

L'avenir est en Afrique

Ces retours sont évidemment loin de compenser le nombre de départs vers l’Europe. Mais le succès de ceux qui sont revenus pourrait dissuader ceux qui veulent partir. C’est l’avis de Moubarak Wade, patron d’une agence de communication à Dakar. Il est rentré de France en 2012, après avoir vécu neuf ans à Nice avec un visa étudiant."Ce matin (9 avril NDLR), une pirogue a chaviré à Saint-Louis. Ces gens-là partaient pour l'immigration clandestine. Il y a cinq morts", déplore le jeune homme. "Ces jeunes-là n'ont rien compris. Pour partir, ils ont dû payer au moins 300 000 ou 500 000 francs CFA (760 euros)", explique-t-il.

Ils auraient pu utiliser ce même courage, cette même hargne qu'ils ont mis pour partir en pirogue, pour monter un business ici.

L'Europe est un miroir aux alouettes, disent ces anciens immigrés, qui, pour certains, ont connu en France le chômage ou la xénophobie. Pour eux, l'avenir est clairement en Afrique."Au Sénégal, le retour de la diaspora", un reportage de Géraldine Hallot et Stéphane Beaufils, à retrouver en longueur ce dimanche dans l’émission Interception sur France Inter.

France Inter

Commentaires
0 commentaire
Laisser un commentaire
Recopiez les lettres afficher ci-dessous : Image de Contrôle

Autres actualités

30 - Juillet - 2025

Diomaye Faye sera présent lors de la présentation du plan de redressement économique du pays par Ousmane Sonko prévu le vendredi

Le Premier ministre Ousmane Sonko présentera le Plan de redressement national vendredi prochain, 1er août, à partir de 9h, au Grand Théâtre national. Selon des...

29 - Juillet - 2025

Coopération Sénégal–Chine : Deux nouvelles centrales solaires pour renforcer la souveraineté énergétique

Dans le sillage de la visite d’État du président Bassirou Diomaye Faye en Chine en septembre 2024, le Sénégal franchit une nouvelle étape décisive...

29 - Juillet - 2025

Présentation du Plan de redressement économique : Ousmane Sonko donne rendez-vous le 1er août au Grand Théâtre

Comme annoncé en Conseil des ministres le mercredi 23 juillet, le Premier ministre Ousmane Sonko a révélé la date de présentation du Plan de redressement...

28 - Juillet - 2025

Le projet de construction du site industriel du pôle régional de Thiès lancé

Pour la mise en place du pôle industriel de la région de Thiès, la commune de Thilmakha, dans le département de Tivaouane, a octroyé 300 hectares à...

28 - Juillet - 2025

Situation économique catastrophique du Sénégal : L’expert financier Mohamed Dia accuse le régime de Macky d'avoir saboté le logiciel du ministère des Finances

La situation financière héritée des douze ans de pouvoir du président Macky Sall et son lot de conséquences continue d’alimenter les débats....