Casamance : La forêt de Bissine menacée de disparition
Restaurer la forêt de Bissine, située dans la commune d’Adéane, dans le département de Ziguinchor, qui est, aujourd’hui, presque totalement dévastée par diversions agressions, c’est le pari que s’est donné M. Arona Sonko, le maire de cette localité. En fait, ce massif forestier qui s’étend sur une superficie de 42 km², classé en 1942 est en train de perdre, au fil des années, son lustre d’antan. Autrefois dense et luxuriant dans ses quatre coins, ce patrimoine est aujourd’hui plus que menacé. On est loin des années où cette forêt était un sanctuaire de biodiversité qui abritait une faune variée notamment d'oiseaux rares et une flore précieuse, constituée d’arbres centenaires et du bois d’œuvre très prisés par les artisans. A en croire Arona Sonko, aujourd’hui, plus de 600 hectares du massif sont complétement dégradés et remplacés par des clairières nues .A l’origine : la coupe de bois illégale persistante du fait d’une absence de surveillance efficace, causée par le conflit armé en Casamance qui sévit dans la zone. De nombreux clandestins y viennent chaque jour couper des troncs qu’ils vont fendre et vendre.
‘’Elle (la forêt) est en train de disparaître sous nos yeux’’, alerte M. Sonko visiblement très préoccupé par cette situation. Il ajoute : ‘’Comme vous le savez, la forêt de Bissine est une forêt classée. Et elle est attaquée de toute part, elle est menacée de déforestation. Si rien n’est fait d’ici cinq ans cette forêt va complétement disparaître’’.
Et pour inverser cette tendance qui mène ce patrimoine écologique inexorablement vers la catastrophe, il annonce que sa mairie a élaboré un plan inclusif de sauvetage qui consistera à régénérer toutes les superficies dégradées. Ce plan impliquera plusieurs acteurs parmi lesquels l’Inspection régionale des Eaux et Forêts de Ziguinchor, l’Université Assane Seck, l’Agropole du sud et des ONG locales, note t-il avant d’ajouter que cette restauration de l’écosystème impliquera également les populations, ce qui est un gage d’une gestion durable des ressources. ‘’Nous voulons associer les communautés locales à la préservation de leur patrimoine’’. Pour Arona Sonko, ce n’est qu’en redonnant un rôle central aux populations qu’on pourra sauver cette forêt qui a également des enjeux économiques énormes. A ce sujet, le maire d’Adéane souligne que ce plan est à la fois une réponse écologique et économique pour les jeunes de la Casamance qui est une région où l’emploi est rare et la tentation de l’exploitation forestière illégale grande.
Ce plan prévoit notamment un reboisement massif avec des arbres fruitiers notamment des manguiers et des anacardiers, capables de générer des revenus pour les habitants d’Adéane, et ceux de toutes les communes voisines (Boutoupa Camarakunda, Niaguis et Ziguinchor). Les fruits qui seront récoltés de ces arbres serviront de matières premières à l’Agropole du sud également, avance-il.
‘’Nous, notre projet que nous avons initié au niveau de la mairie consiste à régénérer la forêt en cogestion avec les services des Eaux et Forêts, l’Université de Ziguinchor, quelques organisations non gouvernementales (Ong) et l’Agropole du sud qui est également intéressé, ils nous encouragent à planter des arbres fruitiers surtout des anacardiers et des manguiers. Ça va leur servir de matières premières’’.
M. Sonko assure qu’ils sont fins prêts pour mettre ce dit plan en œuvre mais malgré l’urgence, le projet est suspendu à une autorisation administrative dont la demande a été déposée, par son entremise, depuis février 2024 au ministère de l’Environnement et de la Transition écologique, mais elle reste jusque-là sans réponse.
‘’Tout est prêt. Nous avons même mobilisé un ancien colonel des Eaux et Forêts (Sougou Fara en l’occurrence) comme expert. Il ne manque que le feu vert du gouvernement’’.
Dans la foulée, Arona Sonko a vivement salué la volonté affichée du premier ministre Ousmane Sonko qui souhaite que la gestion des forêts soit transférée aux collectivités territoriales. ‘’C’est exactement ce que nous demandons depuis des années. Il faut faire confiance aux territoires’’, confie t-il.
Mamadou Alpha Diallo