Le banquet des présidents Emmanuel Macron et Macky Sall n’était pas celui du « donner et du recevoir », mais celui du « donner et du reprendre »

05 - Février - 2018
Le président Macron devant ses compatriotes au Sénégal, liste les grands projets gagnés par les entreprises françaises. Il a commencé bien sûr par citer l’un des plus récents et des plus juteux pour la France, à savoir le TER, ensuite il nous apprend que l’entreprise française Fonroche a gagné un marché de 50.000 lampadaires solaires, que 16 ponts seront construits par Matière une entreprise familiale française de BTP. Il a cité le super calculateur qui sera construit et exploité par Atos, il a donné des indications sur l’intervention des entreprises françaises dans la modernisation et le renforcement du réseau électrique, l’acheminement de l’eau dans la région de Dakar, le développement de l’agro-business dans la vallée du fleuve, l’essor du numérique et lui-même a reconnu qu’il y a tellement de domaines d’intervention de la France dans notre pays qu’il ne pourrait tout citer. Je vais quand même ajouter à sa liste l’installation hégémonique de Auchan au Sénégal qui risque de tuer tout le petit commerce de proximité et précariser d’avantage les acteurs du commerce de détail. La concession accordée à Lagardère qui va exploiter toutes les boutiques de l’aéroport de Diass qui d’ailleurs sera géré par une société française ayant à sa tête un directeur français. Même la nouvelle compagnie aérienne du Sénégal va voler avec des Airbus et dirigée encore par un autre Français.
Et dans tout ça où est la place de notre secteur privé national seul vecteur capable de fournir des emplois pérennes aux actifs et nous offrir une croissance « consommer local ». La plupart de ces projets sont portés par des financements publics à coup de milliards de dettes et le plus souvent contractées auprès de la France. Comme vous l’avez constaté, la quasi-totalité des projets du gouvernement sont exécutés par des entreprises françaises et ainsi les crédits que la France octroie au Sénégal pour exécuter ses grands travaux servent à payer les entreprises françaises. Où est l’équilibre dans la relation France-Sénégal et la défense de notre intérêt et notre souveraineté nationale, que des ministres zélés réclamaient après les commentaires de Anne Hidalgo sur l’affaire Khalifa Sall ? 
Si en 2018, nous ne disposons pas d’entreprises au Sénégal capable de fournir 50.000 lampadaires solaires, construire 16 ponts, exploiter un chemin de fer, renforcer notre réseau électrique, donner de l’eau à boire à la population, développer des projets agricoles, exploiter efficacement un commerce et maitriser l’outil informatique, il y a lieu d’être inquiet sur notre capacité à développer notre pays. Ma conviction est que nous disposons de la ressource humaine et du génie capable de hisser notre pays aux rangs des pays les plus modernes de la planète, ce qui nous freine c’est plutôt ce manque de confiance notoire du président Macky Sall à son secteur privé.  Nous sommes en train d’assister à la recolonisation économique du Sénégal comme du temps où c’est la Sonadis qui dominait le commerce, on se chaussait chez Bata, on couvrait nos toitures avec Eternit, Peyrissac nous vendait nos véhicules, Colas faisait nos routes etc. Il y a déjà longtemps que la CSE construit des ponts jusqu’au Cap, pourquoi aujourd’hui donner ces 16 ponts à Matière ?
Je ne suis nullement contre la présence de la France au Sénégal, au contraire nous devons à mon avis renforcer cette coopération multiséculaire, mais tout est dans l’équilibre de nos intérêts. Et du côté du Sénégal cela pourrait renforcer notre Etat et notre secteur privé national et pour la France, cela éviterait le développement du sentiment anti-français qui est très constant dans certains discours aujourd’hui et leurs intérêts seraient sauvegardés.
Ce qu’il faut c’est plus de patriotisme économique, ce qui d’ailleurs est réclamé en France pour la France par certains hommes politiques français. Si notre gouvernement ne renforce pas la capacité de notre secteur privé national et plutôt détricote leurs acquis, n’importe quel taux de croissance, même à deux chiffres ne permettrait notre développement économique, puisqu’il serait porté par des entreprises étrangères.  Ce n’est pas parce que nous réclamerons plus de collaboration entre notre privé national et les multinationales surtout sur des chantiers publics, que ces dernières vont se détournées du Sénégal. L’exemple de Dubaï et de la Chine est là pour nous prouver que le patriotisme politique n’est pas un frein en soi, pour la venue et l’installation des multinationales sur notre territoire ; si elles y trouvent une possibilité de croissance, elles vont venir et sans état d’âme elles partiront s’il n’y a plus rien à gagner. A Un Autre Avenir, nous pensons que le fer de lance de notre politique économique doit être le privé national et le fil conducteur de tout accord avec n’importe quel autre pays, la défense de nos intérêts. Sénégal first comme le dit un certain Donald pour son pays. 
 
Ibrahima Wade, secrétaire général Un Autre Avenir
 
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